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Le Progrès vendredi 4 juillet 2003
COL, A 45, A 89 et
Fourvière, le préfet trace la route
Dans l'entretien qu'il nous a accordé, Michel Besse; le préfet de
Région affirme que la politique de l'Etat en matière d'infrastructures
vise à favoriser la fluidité du trafic dans la région, notamment sur
l'axe nord-sud. Les différents projets, qu'il s'agisse du Contournement
ouest de Lyon, de l'A45 Lyon-Saint Etienne, ou du TGV Lyon-Turin,
s'inscrivent dans cette logique. Des projets qui d'après lui doivent
être replacés à l'échelle européenne et dont on doit analyser, sur
le long terme, " les conséquences des choix et aussi des non choix
".
Quelles sont aujourd'hui
les priorités de l'État pour désenclaver la grande région lyonnaise ?
Il n'y a pas des priorités, mais une politique d'ensemble destinée à
lui donner les moyens de communication et d'accessibilité nécessaires,
qu'il s'agisse de transport ferroviaire, notamment du fret, des liaisons
autoroutières ou de l'aérien. Le premier enjeu est d'organiser au mieux
les relations entre les principales villes centres de Rhône-Alpes,
notamment l'axe Saint Étienne - Lyon - Grenoble. Ensuite il s'agit de
régler des problèmes nationaux, à commencer par celui de la fluidité
du trafic sur l'Axe Nord-Sud, qui est un axe essentiel pour la France.
La liaison TGV Lyon-Turin vous paraît-elle définitivement sauvée ?
n En tous cas la décision qui m'a été indiquée par le ministre des
Transports, M. de Robien, de découpler le contournement fret ferroviaire
de Lyon afin que la partie nord aille irriguer la future ligne à grande
vitesse, est fondamentale. Chacun sait que cette liaison n'est viable que
grâce au fret et dans ces conditions le Lyon-Turin me paraît bien
engagé. Nous allons engager les procédures de consultation de la partie
nord du contournement ferroviaire dès la fin du mois de septembre.
L'objectif est de parvenir au choix de l'un des trois fuseaux retenus, a
la fin de l'année. Quant à la partie sud de ce contournement, qui est
moins urgente, le ministre a demandé à RFF (Réseau Ferré de France) de
nous proposer un périmètre d'étude plus large et après concertation.
Quelles avancées pour les projets autoroutiers régionaux ?
n Les dossiers de l'A 89 (NDLR : Lyon/Balbigny) et l'A 45 (NDLR : Lyon/Saint-Etienne)
avancent. Pour l'A 89, la Déclaration d'Utilité Publique prise par le
ministre et sa décision de permettre à la société concessionnaire
d'adosser cette liaison à la partie ouest du réseau autoroutier, vont
accélérer les choses, car il n'y aura pas besoin de lancer un appel
d'offres. Le ministère considère en effet que nous sommes là dans
l'achèvement d'un itinéraire qui a déjà été concédé à ASF, qui
pourra ainsi financer l'opération. L'objectif est une mise en service en
2010.
En ce qui concerne l'A 45, à l'issue du dernier Comité interministériel
d'aménagement du territoire, une instruction m'a été donnée de passer
à l'étape de la consultation sur la base de la décision qui avait été
prise au niveau du fuseau choisi par le précédent gouvernement et pour
arrêter la bande des 300 mètres. Sur ce projet, l'objectif est d'avoir
une décision de tracé à la fin de l'année.
Comment convaincre les opposants du département du Rhône ?
n Je comprends les inquiétudes et les appréhensions des riverains et des
élus. Il faut donc bien expliquer les choses et écouter. Le rôle de
l'administration locale est d'éclairer le gouvernement sur les avantages
et les inconvénients d'un projet. Je voudrais qu'il soit bien clair que
ce n'est pas l'administration qui choisit, ce sont des décisions qui par
leurs enjeux régionaux mais aussi nationaux, sont politiques au sens
noble du terme. Il appartient aux gouvernements, quels qu'ils soient, de
les assumer dans le temps.
Vous estimez qu'il y a plus d'avantages que d'inconvénients à
réaliser l'A 45 ?
n Je considère surtout que si l'on veut maintenir le niveau économique
et social de l'ouest de la région Rhône-Alpes et lui assurer son avenir,
il doit impérativement bénéficier d'une amélioration la plus rapide et
la plus significative possible de son accès au couloir Saône/Rhône. Le
gouvernement aura à se prononcer, mais je vois bien ce qui se passerait
si nous ne savions pas dans les années qui viennent, faire pour l'ouest
de la Région, ce qui a été fait pour les Alpes depuis 30 ans.
L'aménagement de l'A 47 ne pourrait-il pas résoudre ce problème ?
n Je ne dis pas qu'il ne faut pas faire de travaux pour améliorer
l'exploitation et la sécurité de l'A 47, mais ils ne peuvent en aucun
cas remplacer la réalisation de l'A 45. J'ajoute que si l'on devait
ouvrir un chantier d'élargissement de l'A 47, on serait pendant de
nombreuses années quasiment obligés de la couper ou en tout cas de
réduire tellement la circulation, qu'on rendrait le trafic encore plus
impossible. De toute façon ceci ne permettrait pas de créer un
itinéraire pourtant indispensable de doublement de l'A 47. Cet
élargissement aurait en outre un coût environnemental par rapport aux
habitants qui serait tout à fait considérable et il ne modifierait pas
sensiblement les caractéristiques de cet ouvrage dangereux.
L'A 45 sans le Contournement Ouest de Lyon est-elle envisageable ?
n Les trois opérations, COL, A 89 et A 45 sont distinctes par leurs
procédures, leurs calendriers, leurs financements et sont donc conduites
séparément. Il est cependant évident que sur le plan fonctionnel, il y
a un lien entre les trois. Les réaliser toutes les trois, serait un moyen
de les optimiser mais il n'est pas nécessaire que le calendrier soit le
même. Le COL n'est pas indispensable à l'engagement des deux autres
opérations. C'est d'ailleurs le sens de l'avis du Conseil d'État rendu
sur le projet d'A89.
Où en est précisément le dossier du COL ?
n Le gouvernement n'a pas encore fait connaître sa position. Cependant,
on peut assurer que si le Contournement ouest doit se faire, il est exclu
qu'il traverse le vignoble de la Côte-Rôtie. Je note qu'il est un
élément majeur pour permettre la réalisation du périphérique ouest de
Lyon. Je n'imagine pas que dans l'avenir, on puisse prendre la
responsabilité d'accepter le TOP ( tronçon ouest du périphérique) s'il
n'y a plus de perspective de contournement ouest. Cela conduirait à
renvoyer au plus près de l'agglomération lyonnaise une circulation que
l'on veut, au contraire, écarter en séparant les différents flux de
circulation. Par ailleurs, s'il devait y avoir un jour un accident sous le
tunnel de Fourvière, de type de celui du Mont-Blanc, qui rende
inutilisable cet ouvrage pendant une durée relativement longue, je ne
sais pas où l'on ferait passer les 100.000 véhicules qui l'empruntent
quotidiennement. Ni la Rocade Est, ni Laurent-Bonnevay ne sont capables
d'absorber ce supplément de trafic. Il ne m'appartient pas de préjuger
des décisions qui seront prises sur le COL, mais il y a là une question
qui devra trouver une réponse un jour.
On dispose aujourd'hui de tous les outils juridiques qui garantissent son
développement, même si celui-ci devait s'accélérer du fait de
décisions nationales. La possibilité de faire quatre pistes existe,
même si on n'en a besoin que dans cinquante ans, sans que pour autant le
développement des vingt communes qui l'entourent soit bloqué. En
utilisant toutes les possibilités des plans d'occupation des sols,
celles-ci peuvent augmenter globalement leur population de 40 %. Il ne
s'agit pas d'un blocage, mais d'un cadrage par rapport aux modifications
futures du POS, pour éviter ce qui s'est fait à Roissy où, lorsqu'on a
construit l'aéroport il y avait très peu d'habitants dans les 30 Km à
la ronde, alors qu'ils sont des centaines de milliers aujourd'hui.
Par ailleurs, le nouveau Plan d'exposition au bruit sera mis en révision
avant la fin de l'année. Il est là pour éviter ce qui s'est fait sur
les vingt dernières années, c'est à dire des constructions dans des
zones exposées au bruit, qu'on n'aurait jamais dû laisser faire.
Les oppositions auxquelles se heurtent tous ces projets ne sont-elles
pas de nature à inciter les responsables politiques à ne pas prendre de
décisions ?
Tous les grands projets ont connu des périodes de tension, de freinage et
d'accélération. Le TGV Paris-Lyon et le tunnel sous la Manche sont
passés par là. Mais je reste optimiste. L'expérience montre que les
projets se réalisent sous la pression des besoins. Ce qui a remis le
projet Lyon-Turin sur les rails, c'est, hélas, l'incendie du tunnel du
Mont Blanc. Je ne suis pas sûr qu'on en serait là aujourd'hui s'il n'y
avait pas eu la brutale découverte qu'on ne pouvait pas laisser le flux
des poids lourds se poursuivre à travers les tunnels routiers sous les
Alpes. Je ne dis pas que tous les projets verront le jour, mais je crois
qu'ils doivent être replacés a l'échelle européenne et, sur la très
longue durée, qu'on doit analyser les conséquences des choix et aussi
des non choix.
PROPOS RECUEILLIS PAR MANUEL DA FONSECA ET FRANÇOIS SAMARD
COL : opposition toujours vive
Les habitants et élus de l'ouest lyonnais estiment que le contournement
autoroutier envisagé est beaucoup trop près de Lyon. Il serait amené
à traverser des zones de plus en plus habitées.
Le préfet de Région,
Michel Besse, insiste sur le fait que la décision de réaliser ou non le
Contournement Ouest de Lyon, revient au gouvernement et qu'elle engagera
d'ailleurs, de toute évidence, plusieurs gouvernements successifs. Il ne
cache pas cependant que toutes les études qui ont abordé le
contournement de Lyon ont conclu à l'intérêt de le réaliser à l'ouest
de l'agglomération lyonnaise dans un périmètre qu'il a défini avec ses
services. Visiblement marqué par le drame du tunnel du Mont-Blanc, il
tire ouvertement un signal d'alarme en imaginant la situation de la
Région lyonnaise si un accident venait à rendre durablement inutilisable
le tunnel de Fourvière.
Ses arguments qui ne manquent pas de poids, n'ont cependant toujours pas
convaincu les populations de l'ouest lyonnais et leurs élus. Ces derniers
soulignent que 80 % du trafic du tunnel de Fourvière a un caractère
local, et que le COL est, à leurs yeux, beaucoup trop proche du coeur de
Lyon. On toucherait non seulement à un " poumon vert " de
l'agglomération mais aussi à une zone bien que verdoyante de plus en
plus habitée. Le tracé non arrêté du COL mais supputé viendrait
couper en deux certaines communes qui sont en expansion démographique.
D'où, pour eux, la nécessité non pas de contourner Lyon dans ses
environs immédiats, mais d'achever des itinéraires alternatifs à la
vallée du Rhône comme le diagonale Chalon-sur-Saône/Paray-le-Monial/Roanne/Saint-Etienne/Toulouse.
Le passage historique par la vallée du Rhône pour une grande partie du
transit ne s'imposerait plus à l'échelle européenne. La Région
lyonnaise pâtirait-elle alors économiquement de cet éloignement des
grands flux migratoires ?
F.S.
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